Loi séparatisme : échec du recours des associations cultuelles contre les décrets d’application
Publié le 12.01.2023
Loi du 24 août 2021 confortant les principes de la République : les contraintes des imposées aux associations mixtes sont "légitimes et proportionnées".
Dans cette affaire, cinq associations ont formé un recours contre la Loi Séparatisme pour excès de pouvoir devant le Conseil d’Etat, en vue d’obtenir l’annulation des deux décrets suivants :
- Décret n° 2021-1789 du 23 décembre 2021 pris pour application de la loi du 2 janvier 1907 concernant l’exercice public des cultes ;
- Décret n° 2021-1844 du 27 décembre 2021 relatif aux associations cultuelles régies par la loi du 9 décembre 1905.
Contexte du recours contre la Loi Séparatisme ?
Ces décrets, pris en application de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, viennent préciser les modalités et les seuils applicables aux nouveaux contrôles et obligations imposés aux associations cultuelles et aux associations « mixtes », tels que :
- L’obligation de transmettre la liste des lieux dans lesquels est organisé le culte ;
- L’établissement d’un compte d’emploi des ressources reçues dans le cadre d’un appel public à la générosité destiné à soutenir l’exercice du culte ;
- Le respect de la nouvelle procédure de déclaration de la qualité cultuelle ;
- L’obligation de certification des comptes des associations cultuelles ayant reçu des financements provenant de l’étranger.
Position du Conseil d’État sur ces recours des associations cultuelles :
Dans son arrêt du 22 décembre 2022, le Conseil d’État a confirmé la légalité de ces deux décrets.
Selon son analyse, les contraintes et contrôles imposés par ces décrets, contrairement à ce que soutenaient les associations, ne portent pas d’atteinte injustifiée et disproportionnée aux libertés d’association et de religion garanties par les articles 9 et 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
En effet, le Conseil d’Etat rappelle que la Convention européenne des droits de l’homme prévoit « qu’une atteinte portée à la liberté d’association, la liberté de pensée, de conscience et de religion » est justifiée lorsque que « celle-ci est prévue par la loi, qu’elle poursuit un but légitime (1), qu’elle est nécessaire dans une société démocratique (2) et est proportionnée au but poursuivi (3) ».
En l’espèce, selon le Conseil d’Etat, les dispositions litigieuses :
1. Poursuivent un but légitime :
- Elles visent à assurer la transparence financière des activités cultuelles des associations concernées et répondent à un objectif de préservation de l’ordre public (décret n° 2021-1789 sur l’exercice public des cultes) ;
- Elles instaurent un contrôle de l’autorité administrative qui vise, d’une part, à assurer que les associations cultuelles reçoivent des avantages en lien direct avec leur objet exclusivement cultuel, et, d’autre part, à garantir la transparence de leur financement et le bon emploi de leurs ressources (décret n° 2021-1844 sur les associations cultuelles).
2. Sont nécessaires dans une société démocratique, et,
3. Sont proportionnées au but poursuivi :
- Le champ d’application des mesures portées par le décret n° 2021-1789 sur l’exercice public des cultes est limité aux associations dont les ressources, le budget ou les subventions publiques annuelles dépassent un seuil défini par décret en conseil d’Etat ;
- Les dispositions du décret n° 2021-1844 sur les associations cultuelles n’instaurent qu’un régime déclaratif fondé sur des critères objectifs, rationnels et précisément définis et n’imposent l’obligation de certification des comptes qu’à partir d’un certain seuil.
Le Conseil d’Etat en conclut que les ingérences effectives dans la liberté de constitution et d’exercice des associations cultuelles et « mixtes » ainsi que dans le libre exercice des cultes résultant des dispositions de la loi du 24 août 2021 et de ses décrets d’application, remplissaient bien les conditions cumulatives prévues par la Convention européenne des droits de l’homme et devaient, de ce fait, être considérées comme légales et justifiées.
Anouk MARCHALAND Collaboratrice juridique |
Notre plaidoyer sur la Loi confortant les principes de la république à retrouver ici : Nos plaidoyers.
Pour suivre les actualités juridiques et fiscales du secteur, rendez-vous ici et abonnez-vous à notre newsletter ici.
Références :
- Conseil d’État, 10ème et 9ème chambres réunies, 22 décembre 2022, n° 461800
- Décret n° 2021-1789 du 23 décembre 2021 pris pour application de la loi du 2 janvier 1907 concernant l’exercice public des cultes
- Décret n° 2021-1844 du 27 décembre 2021 relatif aux associations cultuelles régies par la loi du 9 décembre 1905
- Articles 9 et 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.