L’entreprise à gestion désintéressée – La voie de la raison ?
Publié le 23.05.2024
France générosités a coordonné un dossier intitulé « L’entreprise à gestion désintéressée – La Voie de la raison ? » dans le numéro du 1er mai 2024 de la revue Juris associations. Décryptage des principaux apprentissages de ce dossier.
France générosités, avec la Coalition générosité, propose depuis plusieurs années un nouveau modèle économique permettant aux associations et fondations d’exercer une activité lucrative au service de leur mission sociale désintéressée tout en faisant appel à la générosité : l’entreprise à gestion désintéressée (EGD).
Le développement d’une activité économique – une nécessité pour certaines organisations sans but lucratif
Les domaines d’intervention des organismes sans but lucratif sont nombreux, et certains d’entre eux tendent à interférer avec le monde économique. Malgré l’absence de but lucratif, certaines organisations sans but lucratif sont obligées de créer une forme d’entreprise commerciale pour pouvoir réaliser leur mission sociale.
Ainsi, les organisations qui œuvrent en faveur de l’insertion professionnelle des personnes éloignées de l’emploi ou de l’habitat inclusif (personnes âgées, personnes en situation de handicap, personnes en situation de précarité…) doivent créer une entreprise pour développer leurs activités et répondre à des marchés publics.
De la même manière, les organisations qui agissent en faveur de la recherche médicale, comme l’AFM-Téléthon, sont obligées de créer une société commerciale pour pouvoir exploiter des brevets.
Par ailleurs, face aux difficultés économiques et à la baisse des financements publics, les organismes sans but lucratif peuvent être amenés à exercer des activités économiques pour développer de nouvelles ressources.
Des obstacles juridiques et fiscaux pour les organisations faisant appel à la générosité
Le recours à la forme commerciale est inadapté à la nature et au modèle économique des organisations sans but lucratif.
D’un côté, la doctrine fiscale ne permet pas d’utiliser des ressources issues de la générosité pour réaliser des activités dites « lucratives ». Le droit en vigueur subordonne la non-lucrativité des associations à leur gestion désintéressée et au fait que leurs activités non lucratives restent significativement prépondérantes. L’administration fiscale fonde son analyse de la non-lucrativité sur l’absence de concurrence du secteur commercial. Ainsi, dès lors qu’un organisme développe des activités dans des conditions similaires à des concurrents lucratifs, les activités seront considérées comme lucratives.
De l’autre côté, les organisations sans but lucratif peuvent difficilement faire appel à des investissements privés, dans la mesure où leurs activités ne sont pas ou peu rémunératrices. De plus, l’ingérence d’investisseurs privés pourraient interférer avec l’indépendance des organisations et entraver la bonne poursuite de leur mission sociale.
Une proposition portée par France générosités : l’entreprise à gestion désintéressée
Pour répondre aux besoins des organisations sans but lucratif et dépasser les obstacles juridiques et fiscaux imposés par le droit actuel, France générosités propose la création d’un nouveau statut d’entreprise à gestion désintéressée (EGD).
Ce nouveau modèle économique permettrait aux associations d’exercer une activité lucrative au service de leur but non lucratif.
L’EGD présente les caractéristiques d’une société classique mais doit être gérée de manière strictement désintéressée. Dans ce cadre, l’EGD devra respecter un certain nombre de critères.
Fondée par un organisme sans but lucratif, l’EGD doit être quasi exclusivement contrôlé par celui-ci pour garantir sa gestion désintéressée. Son objet économique se situe dans le prolongement de l’objet social de l’organisme fondateur. Concernant sa gouvernance, le président de l’EGD n’est pas rémunéré. De plus, un comité de surveillance assure le respect de l’objet social de l’entreprise. Les résultats de l’entreprise sont mis en réserve ou utiliser pour développer sa mission sociale. Le surplus éventuel pourra être renversé à l’organisme fondateur, ces bénéfices éventuels sont soumis à l’impôt sur les sociétés. De plus, les comptes de l’entreprise sont certifiés par un commissaire aux comptes.
La suite : l’inscription du statut d’entreprise à gestion désintéressée dans la loi ?
La création d’un statut spécifique d’entreprise à gestion désintéressée fait partie des propositions portée par la Coalition Générosité qui réunit les principaux acteurs du secteur associatif.
A la rentrée, France générosités publiera une étude d’impact sur l’entreprise à gestion désintéressée. Cette étude servira de fondement pour soutenir l’inscription du statut d’entreprise à gestion désintéressée dans le cadre de la loi.
A suivre… !
Pour accéder au dossier complet : https://www.dalloz-revues.fr/revues/Juris_associations-48.htm
La liste des contributeurs : Thierry Guillois (Avocat à la Cour, cabinet PDGB), Jérémy Chevalier (Avocat à la Cour, cabinet PDGB), Lionel Devic (Avocat associé, Delsol avocats), Emmanuel Sadorge (Avocat associé, Legicoop), Philippe Durand (Avocat associé, PWC), Nicolas Mitton (Responsable juridique et affaires publiques, Centre français des fonds et fondations), Claire Schiller-Heuzé (Directrice marketing et développement des ressources, AFM-Téléthon), Jérôme Moitry (Trésorier, Fondation CentraleSupéléc), Sarah Bertail (Directrice juridique et fiscale, France générosités), Pierre Siquier (Président, France générosités).
Pauline Hery Chargée d’affaires publiques |
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