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Le rétrécissement de l’espace civique en Europe – Regard sur les Pays-Bas #1

Publié le 19.11.2024

L’organisation européenne European Fundraising Association (EFA) lance une série d’articles « Spotlight on civic space » qui explore la tendance et l’impact du rétrécissement de l’espace civique à travers l’Europe, ainsi que ses conséquences sur la générosité et la réponse du secteur associatif et fondatif à ces défis. Dans ce premier article, Ross Verde, chargé d’affaires publiques au sein de l’organisation professionnelle pour les organisations sans but lucratif aux Pays-Bas Goede Doelen Nederland, partage ses réflexions sur la situation actuelle aux Pays-Bas.

Aux Pays-Bas, les organisations sans but lucratif (OSBL) jouent un rôle essentiel dans la défense des valeurs européennes et la résolution des enjeux sociétaux. Ces organisations sont nées de l’engagement de citoyens soucieux du bien-être des personnes en situation de précarité, des animaux, de la nature, de l’environnement ou encore de la culture. Elles incarnent les préoccupations, frustrations, aspirations et besoins de millions de personnes, leur offrant ainsi une voix sur des sujets qui leur tiennent à cœur. Cependant, les politiques gouvernementales récentes exercent une pression croissante sur leur capacité à agir efficacement.

Au sein de Goede Doelen Nederland, nous nous engageons à garantir un environnement permettant aux OSBL de travailler en toute indépendance. Pourtant, les évolutions récentes révèlent une tendance inquiétante à la réduction de l’espace civique dans notre pays.

Les OSBL font face à une pression croissante sur leurs ressources (les avantages fiscaux sur les dons, les subventions et les loteries solidaires) ainsi que sur leur capacité d’accès à la justice et leur droit de manifester.

Image Dall E sur le rétécissement de l'espace civique européen (1)

Image générée par ChatGPT selon une description fournie par France générosités.

Accord de coalition

Le 2 juillet 2024, le gouvernement du Premier ministre Dick Schoof récemment formé, soutenu par une coalition de parti de droite et d’extrême droite, a annoncé des coupes budgétaires concernant la réduction fiscale pour les dons faits aux associations. Face à la pression sociale, la mesure visant les dons individuels a finalement été annulée. Cependant, celle visant le mécénat des entreprises a été maintenue pour le moment.

Le programme gouvernemental de la coalition, intitulé “Espoir, courage et fierté”, propose également des mesures ayant un impact négatif sur les OSBL, notamment un projet visant à imposer des exigences plus strictes aux organisations impliquées dans des actions en justice contre le gouvernement pour l’obliger à respecter les traités et la législation en vigueur.

Selon l’Ordre des avocats néerlandais (Nederlandse Orde van Advocaten), ce projet présente des risques majeurs. Leur rapport récent, Rechtsstatelijke Toets Regeerprogramma 2024 (Évaluation constitutionnelle du programme de coalition 2024), met en lumière des préoccupations communes quant à son impact potentiel sur l’État de droit.

 

Des nouveaux défis législatifs

Un nouveau projet de loi vise à renforcer la transparence des dons, notamment en ce qui concerne leur montant et leur origine. En outre, une ordonnance de cessation est introduite pour les organisations susceptibles de constituer une menace potentielle pour l’État de droit ou l’autorité publique.

Si ces mesures visent une plus grande responsabilisation, elles risquent d’affaiblir l’indépendance et l’efficacité des OSBL.

De plus, la coalition gouvernementale a proposé des révisions des lois existantes qui pourraient limiter les libertés civiques, en particulier le droit de manifester.

 

Une pression réglementaire accrue

Les OSBL sont aujourd’hui confrontées à un enchevêtrement d’exigences réglementaires qui mettent à l’épreuve leur capacité opérationnelle. Les réglementations européennes en matière de protection de la vie privée, de protection des consommateurs et de transparence, bien qu’elles soient destinées à renforcer la responsabilité et la transparence de nos organisations, nous ont imposé une lourde charge administrative. Cette surcharge réglementaire détourne des ressources précieuses des missions des organisations sans but lucratif, ce qui les empêche de répondre plus efficacement aux besoins sociaux urgents.

 

Les barrières juridiques et financières

La tendance croissante des banques à « éviter les risques » ajoute des difficultés importantes. Les banques néerlandaises, adhérant à des réglementations gouvernementales strictes visant à minimiser le risque de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme, refusent souvent d’ouvrir des comptes aux organisations à but non lucratif.

L’ouverture de nouveaux comptes est devenue de plus en plus difficile, les comptes existants sont résiliés et les transferts de fonds – que ce soit vers des régions à haut ou à faible risque – sont soumis à de longs délais. Cette pratique complique la gestion financière et met en péril la stabilité financière des organisations sans but lucratif.

La situation aux Pays-Bas reflète une tendance mondiale plus large de rétrécissement de l’espace civique. À mesure que les réglementations se durcissent et que les financements deviennent moins accessibles, les OSBL du monde entier sont confrontées à des difficultés croissantes pour remplir leurs missions. Il est crucial que les acteurs internationaux reconnaissent ces défis, car les implications d’un secteur affaibli dépassent largement les frontières nationales.

 


Article issu du site de l’EFA, rédigé par Ross Verde et traduit en français par Pauline Hery, chargée d’affaires publiques chez France générosités.

France générosités et l’Association françaises des Fundraisers sont membres de l’EFA pour la France. France générosités pilote le groupe dédié aux affaires publiques. Pour suivre nos actualités à ce sujet, inscrivez-vous par ce lien ci.

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