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Dématérialisation des procédures des organismes philanthropiques : où en est-on ?

Publié le 17.01.2025

Chantier lancé en 2022 par le ministère de l’Intérieur, la dématérialisation des procédures relatives aux associations et fondations est bien en marche. Une nouvelle plateforme dénommée « Service d’information des associations et fondations » a ainsi été mise en ligne et devrait permettre de réaliser une trentaine de procédures de manière dématérialisée. Précisions sur les contours de cette nouvelle plateforme. Le présent article est mis à jour au regard des précisions apportées par le ministère de l'Intérieur. < Publié le 8 janvier 2025, mis à jour le 17 janvier 2025. >

Dans un contexte de contrôle accru des organismes à but non lucratif notamment avec la loi confortant le respect des principes de la République et partant du constat du défaut d’information partagée des différents services de l’administration, le ministère de l’Intérieur a lancé en 2022 un chantier en vue de dématérialiser et simplifier un certain nombre de procédures. Ce chantier s’est formalisé l’été dernier par la publication du décret n°2024-720 du 5 juillet 2024 qui permet effectivement de dématérialiser et simplifier les procédures applicables aux organismes philanthropiques, notamment concernant la reconnaissance d’utilité publique[1] et par la mise en service progressive d’une nouvelle plateforme dénommée « service d’information des associations et fondations » (SIAF). Cette plateforme devrait aussi permettre d’accélérer les délais l’instruction des dossiers (environ 400 en cours d’examen) qui peuvent aller aujourd’hui jusqu’à 2 ans.

 

 

1. Champ d’application de la nouvelle plateforme

Cette plateforme doit permettre de réaliser les procédures suivantes qui concernent les associations reconnues d’utilité publique (ARUP), les fondations reconnues d’utilité publique (FRUP), les fonds de dotation, les fondations d’entreprise ainsi que les associations simplement déclarées et associations cultuelles pour certaines procédures spécifiques.

6 procédures pour les fondations d’entreprise :

  • Autorisation de création (préfecture)
  • Autorisation de modification statutaire (préfecture)
  • Prorogation et majoration par avenant (préfecture)
  • Déclaration annuelle des comptes et rapport d’activité (préfecture)
  • Déclaration des changements dans l’administration (préfecture)
  • Déclaration de dissolution (préfecture)

 

6 procédures pour les fonds de dotation :

  • Déclaration de création (préfecture)
  • Déclaration de modification statutaire (préfecture)
  • Déclaration annuelle des comptes et rapport d’activité (préfecture)
  • Autorisation pour procéder à l’appel à la générosité (préfecture)
  • Déclaration des changements dans l’administration (préfecture)
  • Déclaration de dissolution (préfecture)

 

2 procédures relatives aux libéralités et aux appels à la générosité du public :

  • Déclaration des libéralités aux Etats et établissements étrangers (Direction des libertés publiques et des affaires juridiques – DLPAJ)
  • Déclaration d’appel à la générosité du public (préfecture)

 

2 procédures pour les associations loi 1901 :

  • Délivrance d’une décision de non opposition aux legs ou donations (préfecture)
  • Délivrance d’un rescrit administratif de reconnaissance de la capacité juridique à recevoir des legs et donations (préfecture)

 

13 procédures pour les associations et fondations reconnues d’utilité publique :

  • Aide à la création des statuts ARUP/FRUP (DLPAJ)
  • Aide à la modification des statuts ARUP/FRUP (DLPAJ)
  • Dépôt de demande reconnaissance d’utilité publique (DLPAJ)
  • Dépôt de demande de modification statutaires ARUP/FRUP (DLPAJ)
  • Déclaration de règlement intérieur ARUP/FRUP (DLPAJ)
  • Déclaration de changes des partenaires institutionnels FRUP (DLPAJ)
  • Déclaration de transfert de siège social ARUP/FRUP (DLPAJ)
  • Demande de dissolution ou de retrait de reconnaissance d’utilité publique ARUP/FRUP (DLPAJ)
  • Déclaration des changements dans l’administration ARUP/FRUP (préfecture)
  • Autorisation des emprunts (préfecture)
  • Autorisation des aliénations et apports (préfecture)
  • Transmission annuelle des comptes rapports d’activité ARUP/FRUP (préfecture)
  • Transmission des PV des FRUP (préfecture)

 

2 procédures relatives aux associations cultuelles :

  • Déclaration de la qualité d’association cultuelle (préfecture)
  • Déclaration des financements étrangers (DLPAJ).

 

A ce jour, les associations simplement déclarées ne sont donc que ponctuellement concernées et le registre national des associations (RNA) va subsister dans l’attente d’une fusion avec ce nouvel outil (probablement en 2026).

Ne sont pas non plus visées les fondations à objet spécifique (de coopération scientifique, hospitalières, universitaires, partenariales) ni les fonds de pérennité.

La priorité affichée par le ministère de l’Intérieur est donc de traiter le cas des organismes pour lesquels il n’y a pas de système d’information organisé (“procédure papier”).

A ce jour seules les fondations reconnues d’utilité publique peuvent utiliser cette plateforme pour les démarches suivantes :

  • création,
  • modification des statuts, déclaration de règlement intérieur, déclaration de changement de siège social, déclaration de changement de partenaires institutionnels

Pour effectuer ces formalités il faut disposer d’un numéro d’identifiant dans le “référentiel national des fonds et fondations” (RNF). Pour les structures existantes, cette demande est effectuée ici.

2. Une nouvelle méthode de travail

Nous attirons votre attention sur le changement de méthode opéré par l’administration. Dans le cadre d’une phase de préinstruction (service d’accompagnement à l’élaboration des projets), les porteurs de projet sont invités à répondre à un certain nombre de questions (« formulaire d’aide à la rédaction ») qui permettront au Bureau des associations et fondations (BAF) du ministère de l’Intérieur de rédiger un projet de statuts. Ce projet de statuts rédigé par l’administration n’est pas impératif et pourra être discuté par les porteurs de projet mais il est fortement incitatif : le ministère de l’Intérieur précise en effet que “le délai d’instruction ultérieur du dossier sera d’autant plus réduit que l’ensemble de questions, remarques et demandes auront été réglées par anticipation“. Cette demande d’aide est “facultative mais fortement recommandée“.

La marge de manoeuvre est don limitée.  En tout état de cause, la pratique habituelle visant à motiver chaque écart par rapport aux statuts-types est maintenue.

Après cette phase de préinstruction, une phase d’instruction est ouverte. Tout dossier incomplet sera automatiquement rejeté.

En ce qui concerne les modifications statutaires, une phase de préinstruction est également mise en place. Il conviendra sur la plateforme d’expliquer les motifs de cette modification statutaire. Si les statuts ne correspondent pas aux statuts-types actuels, ils devront être modifiés intégralement (ce qui était déjà la pratique jusqu’alors).

En ce qui concerne le règlement intérieur des associations et fondations reconnues d’utilité publique, dont le contenu est désormais fixé par l’arrêté du 8 novembre 2024, les organismes concernés n’ont pas l’obligation dès à présent de mettre à jour leur règlement intérieur. Cette mise à jour s’effectuera, si besoin, à l’occasion d’une déclaration de modification.

A titre transitoire, les dossiers déjà déposés et en cours d’examen n’ont pas l’obligation d’être redéposés en ligne, la procédure suivant son cours.

 

3. Architecture du projet

Le choix a été fait de passer par le site https://www.demarches-simplifiees.fr/ que les organismes faisant appel à la générosité connaissent car il permet de déclarer les dons reçus et le nombre de reçus fiscaux émis[2].

Pour la procédure d’aide à la l’élaboration des statuts d’une fondation, c’est ici . Pour déposer une demande de création d’une fondation c’est ici. Pour la procédure d’aide à la modification des statuts d’une fondation c’est ici. Pour la procédure de demande de modification statutaire d’une fondation c’est ici. Pour déclarer le règlement intérieur d’une fondation c’est ici. Pour déclarer le changement de siège social ou le changement de partenaires institutionnels d’une fondation c’est ici et ici.

Le dossier sera automatiquement envoyé au service compétent et une messagerie intégrée facilitera les échanges entre l’administration et le porteur de projet. La plateforme permettra de suivre également l’état d’avancement du dossier.

Autour de ce site, une « bibliothèque numérique » absorbera toutes les données déposées et servira d’espace de stockage et un « registre national » est créé afin de recenser toutes les données légales. Ce registre n’est pas accessible au public. En effet, chaque structure disposera d’un numéro d’identifiant propre qui permettra aux administrations de collecter facilement des informations utiles sans le demander à l’organisation elle-même (application du principe « dites le nous une fois »).

 

4. Calendrier

Pour les fondations, la plateforme est en opérationnelle. La plateforme devrait être bientôt opérationnelle pour les ARUP.

Pour les procédures qui relèvent de la compétence des préfectures, la plateforme sera d’abord expérimentée au premier trimestre 2025 sur six départements puis étendue à toute la France au deuxième trimestre 2025.

 

5. Focus sur les bénéficiaires effectifs

Selon l’article L. 561-4-1 du Code monétaire et financier, les entreprises visées à l’article L. 561-2 du Code monétaire et financier doivent appliquer des mesures de vigilance dans le cadre de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. En particulier, elles doivent identifier le « bénéficiaire effectif » de leur client.

Le bénéficiaire effectif est, selon l’article L. 561-2-2 du Code monétaire et financier, la ou les personnes physiques

  • Soit qui contrôlent directement ou indirectement le client
  • Soit pour laquelle une opération est exécutée ou une activité est exercée.

Jusqu’en avril 2024, les associations, fondations et fonds de dotation devaient obtenir et conserver les informations sur leurs bénéficiaires effectifs (article L. 561-45-1 du code monétaire et financier) sans obligation de les déclarer dans un registre centralisé (article L. 561-46 du code monétaire et financier).

Depuis la loi n°2024-364 du 22 avril 2024, les associations, fondations et fonds de dotation doivent désormais déclarer ces bénéficiaires effectifs dans un registre dédié (nouvel article L. 561-46-1 du code monétaire et financier).

En outre, la définition des bénéficiaires effectifs des associations, fondations et fonds de dotation a été modifiée par le décret du 5 juillet 2024 précité.

L’ancien article R. 561-3 du Code monétaire et financier visait le ou les représentants légaux de l’association, le président, le directeur général ainsi que, le cas échéant, le ou les membres du directoire de la fondation et le président du fonds de dotation. Est désormais visée « toute personne exerçant en son sein des fonctions d’administrateur, des fonctions de surveillance ou des fonctions de direction est regardée comme bénéficiaire effectif ».

Cette définition élargie du bénéficiaire effectif inclut donc tous les membres du conseil d’administration d’une association, d’une fondation ou d’un fonds de dotation, mais aussi le directeur général ou toute autre personne exerçant des fonctions de ce type. Le ministère de l’Intérieur a précisé que les fonctions de direction visées sont les directeur les plus haut placés, à savoir “les trois premiers de l’organigramme.

En pratique, le ministère de l’Intérieur indique que, dès lors que le SIAF sera en place, « la déclaration des données relatives aux bénéficiaires effectifs se fera via les téléprocédures suivantes :

  • lorsque l’organisme se crée, par le biais du formulaire numérique de demande de création de la structure,
  • lorsque l’organisme existe déjà, par le biais du formulaire numérique de demande d’attribution d’u numéro d’identifiant
  • pour tous les changements ultérieurs concernant les bénéficiaires effectifs de la structure, par le biais du formulaire numérique de déclaration de changement dans l’administration de la structure.

Point d’attention : lorsque l’organisme est immatriculé au registre national des entreprises dit RNE (car il emploie des salariés, demande des subventions publiques ou est soumis aux impôts commerciaux), c’est bien dans les registres dédiés audit organisme (répertoire national des associations pour les associations ou registre des organismes philanthropiques pour les fondations et non au RNE que cette déclaration doit être effectuée ».

Le chantier n’est pas terminé mais le SIAF devrait permettre de fluidifier les échanges avec les administrations concernées. En outre, cela permettra de collecter des données statistiques fiables utiles à la réalisation d’études. Nous pouvons toutefois regretter le manque de concertation avec les autres plateforme en ligne qui semblent subsister pour la plupart.

 

Sarah Sarah Bertail
Directrice juridique et affaires publiques

 

[1] Cf. notre article

[2] En vertu de l’article 222 bis du Code général des impôts.

 


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